Interview Elisabeth de Visme

Interview Elisabeth de Visme

Depuis le 1er janvier 2019 toutes les entreprises de plus de onze salariés doivent disposer d’ un Référent harcèlement sexuel et sexisme voire de deux….

Interview  à ce propos d’ Elisabeth de Visme, formatrice, coach et médiatrice au sein du cabinet Mémentor Action.
Spécialisée dans la qualité de vie au travail et la prévention des risques psychosociaux, elle est certifiée par le réseau Assurance Maladie Risques professionnels/INRS pour l’animation de formations à la prévention des risques psychosociaux.

Question : Le harcèlement et le sexisme sont des sujets d’actualité depuis plus de 18 mois. En quoi les entreprises sont-elles concernées ?

Elisabeth de Visme : « Les révélations de l’affaire Weinstein ont en effet été le déclencheur, depuis fin 2017, de nombreuses discussions sur le harcèlement sexuel. A cela s’ajoute une préoccupation de longue date quant à l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes. Plus récemment, les discussions se sont portées sur le sexisme. C’est tout-à-fait pertinent, car ce sont bien les attitudes sexistes qui sont à l’origine de discriminations selon le sexe, tout particulièrement envers les femmes, et qui sont un terreau pour le harcèlement sexuel. Les entreprises savent que ces comportements délétères ont cours entre leurs murs, et que cela nuit à la santé de leurs salariés et à l’efficacité des équipes, sans parler des effets sur l’image de l’entreprise. Un certain nombre se sont emparées de la question et forment leurs managers, et certaines organisent la sensibilisation de l’ensemble de leurs salariés, ce qui est tout-à-fait pertinent.

Q : Ces préoccupations ont amené des évolutions législatives récentes…

EV : « Dans le cadre d’un plan d’action pour la prévention du harcèlement et du sexisme, le troisième pilier est la mise en place d’un processus d’alerte : il faut que les salariés sachent à qui s’adresser, si l’on est victime ou témoin d’agissements qui relèvent du harcèlement, et comment leur alerte va être traitée. Le législateur a imposé, depuis le 1er janvier 2019, la désignation de deux référents pour lutter contre le harcèlement sexuel et le sexisme : un référent nommé par l’employeur, obligatoirement dans les entreprises de plus de 250 salariés, et un référent désigné parmi les membres du CSE, quelle que soit la taille de l’entreprise. C’est l’occasion de mettre en place un processus d’alerte clair et communiqué à tous.

Q : Quel devrait être le rôle de ces référents ?

EV : « Le référent désigné par l’employeur est « chargé d’orienter, d’informer et d’accompagner les salariés en matière de lutte contre le harcèlement sexuel et les agissements sexistes » (article L1153-5-1 du Code du travail, créé par la loi du 5 septembre 2018). Ce n’est donc pas qu’un rôle de « hot-line » pour les victimes et le référent pourra être moteur dans la définition de politiques et d’actions. C’est à l’employeur de définir le champ d’action du référent, et nous ne pouvons que souhaiter que les DRH se saisissent de l’occasion pour déployer des politiques volontaristes.

Le rôle du référent désigné au sein du CSE, quant à lui, n’est pas du tout précisé (article L2314-1). Je sais que dans certaines entreprises, des actions menées conjointement par les deux référents sont envisagées, et c’est une bonne chose. »

Q : Ces sujets étaient peu traités jusqu’ ici par les entreprises, à quelles conditions les référents pourront-ils avoir une action efficace ?

EV : « Une des premières conditions pour que les référents puissent agir est qu’ils connaissent le sujet. Or la culture de la prévention en matière de harcèlement sexuel et de sexisme est globalement très faible dans les entreprises, même parmi les professionnels des RH. La formation des référents est donc essentielle. Certaines entreprises prévoient de former ensemble les deux référents, et je recommande d’en profiter pour former l’ensemble des acteurs de la gestion des RH et plusieurs élus du CSE, au risque de laisser les référents dans une posture de Don Quichotte. Il s’agit de faire évoluer la culture de l’entreprise, car le sexisme imprègne les relations de travail, plus ou moins selon les secteurs d’activité et la plus ou moins grande mixité, mais partout néanmoins. »

Q : Une dernière question : les référents sont-ils toujours des référentes ?

EV : Je n’ai connaissance que de désignations de femmes dans ces rôles, sauf dans un cas, où un jeune homme a été désigné, dans un CSE.  Beaucoup d’employeurs et de CSE n’ont pas encore procédés aux désignations : rendez-vous dans quelques mois pour revenir sur votre question.


Après 20 ans dans la fonction RH (Leroy-Merlin, Oracle), elle mène des missions de conseil, de formation, de coaching et de médiation, pour la qualité de vie au travail, la prévention des risques psychosociaux, du harcèlement et des discriminations.Titulaire du DESS (Master 2) en Psychologie (Lyon 2), du DESS en Management des Ressources humaines (IAE Paris I Panthéon-Sorbonne) et du DU Management de la QVT de l’IAE de Lyon 3.Concernant la prévention des RPS, elle s’est formée à l’Agence nationale de l’Amélioration des Conditions de Travail (ANACT), à l’Institut national de Recherche et de Sécurité (INRS)  et à la Caisse régionale d’Assurance Maladie d’Ile-de-France (CRAMIF), certifiée par le réseau Assurance Maladie Risques professionnels / INRS pour l’animation de formations à la prévention des risques psychosociaux.

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